La procédure d’abus de droit de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales et l’acte anormal de gestion
La société requérante avait consenti des avances à ses associés leur permettant d’acquérir, à titre personnel, des bois. Par ailleurs, un contrat de vente avait été conclu entre les associés et la société ayant pour objet l’achat des coupes qui seront réalisées. L’administration fiscale a alors qualifié ces avances, consenties sans stipulation d’intérêt, d’acte anormal de gestion.
La société requérante soutient que l’administration a nécessairement qualifié de fictif, le contrat de vente conclu entre elle et ses associés, ce contrat devant être regardé, selon elle, comme une contrepartie des avances accordées. Elle en déduit que l’administration aurait dû mettre en œuvre la procédure de l’abus de droit de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.
L’article L. 64 du livre des procédures fiscales permet à l’administration d’écarter comme ne lui étant pas opposables les actes passés par le contribuable, si elle établit « que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s’il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles » (voir CE, 27 septembre 2006, req. n° 260050, Janfin).
Mais dans ce cas, l’administration est tenue de mettre en œuvre la procédure de l’abus de droit, ce qui est justement reproché ici par la société requérante. Le juge administratif doit examiner si l’administration s’est placée implicitement dans le champ d’application de l’article L. 64 du LPF pour fonder sa rectification. Pierre Collin (sous CE 3/07/2003, Min. c/ SARL Azur industrie) résumait les choses de cette façon « il n’y a pas d’abus de droit implicite lorsqu’un autre fondement légal permet d’asseoir le redressement et que l’administration y a eu recours ».
Le tribunal administratif a jugé que l’administration s’est fondée ici sur les conditions de la vente des grumes qui révélaient l’existence d’une avance consentie sans intérêt, présentant le caractère d’avantages personnels et caractérisant ainsi un acte anormal de gestion. L’administration ne s’est pas fondée sur les actes liant les associés à la société en les regardant comme ayant nécessairement un caractère fictif ou exclusivement fiscal. Ainsi, l’administration ne peut par conséquent être regardée comme ayant invoqué, implicitement mais nécessairement, l’existence d’un abus de droit. Elle s’est fondée uniquement sur l’existence d’un acte anormal de gestion de la société au profit de ses associés.
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