Le refus d’autorisation d’instruction en famille fait l’objet d’un contrôle restreint de la part du juge.
Si le langage courant évoque souvent l’école obligatoire, c’est en réalité l’instruction des enfants qui est obligatoire. La loi du 28 mars 1882, dite loi Ferry, prévoyait en effet que l’instruction pouvait s’effectuer dans la famille, et donc en-dehors de l’école. Cette disposition a été constamment reprise par la suite, même si cette forme d’instruction a été progressivement plus encadrée, notamment par un régime de déclaration qui permettait à l’administration d’opérer des contrôles sur la manière dont l’instruction en famille était effectivement pratiquée.
La loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a profondément modifié les conditions de l’instruction en famille en instituant, à compter de la rentrée scolaire 2022, un régime d’autorisation préalable, cette autorisation ne pouvant être délivrée que pour des motifs prévus par la loi. L’un de ces motifs tient à « L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille (…) ». C’est dans ces conditions que la commission chargée d’examiner les recours contre les décisions des recteurs en la matière a rejeté le recours formé par les requérants contre le refus d’autorisation opposé à leur demande par le recteur de l’académie de Reims.
Si, au cours de l’été 2022, de nombreux tribunaux administratifs ont été saisis en référé de la contestation de telles mesures, le jugement rendu par le tribunal est l’un des premiers à statuer au fond. La formation de jugement a estimé que le contrôle qu’elle avait à opérer sur ces décisions était restreint au contrôle de l’erreur manifeste. Elle y a sans doute été incitée notamment par le fait que, malgré l’importance que revêt cette question pour les parents concernés, le Conseil constitutionnel, par une décision du 13 août 2021, a jugé que l’instruction en famille n’était pas une composante du principe de liberté d’enseignement, mais uniquement une modalité de l’instruction obligatoire.
Pour le reste, après avoir écarté les moyens de légalité externe invoqués dans la requête, le tribunal a jugé que la décision attaquée n’était pas entachée d’erreur manifeste, qu’elle ne conduisait pas à une rupture d’égalité ni à une discrimination, et qu’elle ne méconnaissait pas les stipulations des conventions internationales qui étaient invoquées. Il a ainsi rejeté la requête.